Tout d’abord, présentons ce document. Le matériau que nous allons étudier aujourd’hui est un dessin de presse s’intitulant « Brésil : Les Bolsonaristes tentent un Coup d’état ». Cette œuvre réalisée par le célèbre caricaturiste Herrmann est parue sur le site de la Tribune de Genève ainsi que, dans une variante très similaire, en une du journal Le Monde le 11 janvier 2023. Hermann est un dessinateur suisse qui a travaillé dans de grands quotidiens de son pays en langue française comme l’Hebdo ou La Liberté. Il dessine actuellement pour La Tribune de Genève et ponctuellement pour d’autres journaux suisses ou français, comme dans le cas présent.
Voir le dessin sur le site de la Tribune de Genève
Le dessin a vu le jour dans un contexte particulier et historique au Brésil. En effet, suite aux élections brésiliennes ayant opposé le président sortant Jair Bolsonaro et le candidat fraichement élu Lula da Silva, de nombreuses tensions règnent au sein du pays, notamment à cause de la longue contestation des résultats de la part de l’ancien président. Cela aura pour cause de créer une volonté de soulèvement chez une partie de la population, engendrant une tentative de coup d’état.
Continuons maintenant avec la description de la caricature. Au premier plan, on remarque un groupe de 8 militants brésiliens, hommes et femmes, tous vêtus de jaune et de vert, les deux couleurs du drapeau du Brésil. Ces derniers marchent tous dans la même direction, avec, pour certains, une grande banderole dans les mains. Cet étendard bicolore qui est fièrement brandi est composé de 3 bandes horizontales représentant, certes, le drapeau du pays, mais faisant surtout allusion à la célèbre écharpe présidentielle qui est exactement dans les mêmes dispositions. Parmi le groupe, on voit également, au centre, un vieil homme serrant son poing et ayant un outil de destruction : une batte. On découvre aussi que ce même homme dit « Avec Bolsonaro au pouvoir, ça ne serait jamais arrivé ! ». On comprend donc qu’il est un soutien du président ayant perdu, Bolsonaro, et qu’il regrette sa non-élection. De plus, on observe un autre homme lancer une lourde et grosse pierre vers l’avant. Si certains des participants arborent un sourire, d’autres ont l’air d’être plus contrariés, mécontents, et même révoltés, à l’image de la femme blonde au milieu qui lève son bras et qui semble crier. A l’arrière-plan on aperçoit la fameuse Place des trois pouvoirs à Brasilia, la capitale brésilienne. Plus précisément, il s’agit du Congrès national, caractérisé par son architecture très moderne. A gauche, la coupole convexe abrite le Sénat, et à droite, la coupole concave renferme la chambre des députés. Entre ces deux bâtiments, symboles forts de la démocratie brésilienne, il y a les deux tours de 28 étages qui ne forment rien d’autre que l’Annexe, composée des bureaux des démocrates. Finalement, on voit qu’autour de ces trois bâtiments, il y a une énorme foule de manifestants semblables à ceux décrits précédemment. Cette scène où le jaune et le vert, faisant référence au Brésil, dominent, nous montre que les militants sont unis, fiers de leurs couleurs et ayant un objectif commun. On identifie donc qu’il s’agit de l’incident, considéré comme une tentative de coup d’état, survenu au Brésil le dimanche 8 janvier 2023, soit 3 jours avant la publication de la caricature.
Terminons avec l’interprétation de cette caricature. On peut tout d’abord évoquer la présence de la banderole faisant référence à l’écharpe présidentielle. Le fait que les militants brandissent cette banderole montre qu’ils n’ont toujours pas accepté le résultat des élections. En effet, à l’image de Bolsonaro qui a, pendant plusieurs jours, contestés les résultats, les protestataires considèrent les élections comme truquées et frauduleuses. On rappelle que le 30 octobre 2022, à l’occasion du second tour de ces élections présidentielles, c’est Lula, de gauche, qui a été élu démocratiquement avec 50,9% des voix, contre 49,1% pour Bolsonaro. Bien que cette différence puisse paraitre minime, cela représente plus de 2 millions de voix à l’échelle du pays. De plus, les élections brésiliennes étaient libres et globalement justement organisées. Les manifestants, ou plutôt les soutiens d’extrême droite de l’ancien président, ont donc pris, pendant plusieurs heures, le contrôle des lieux du pouvoir brésilien. Conformément à ce que le dessinateur souhaite montrer, l’homme lançant une pierre et celui ayant la batte mettent en évidence, qu’au-delà d’une prise de contrôle, cet évènement violent était un véritable saccage. Les partisans de Bolsonaro ont effectivement dégradé beaucoup de matériel, bureaux et les principes même du système démocratique. Ce chaos nous rappelle d’ailleurs la prise du capitole aux États-Unis, un an plus tôt. Les raisons de cette attaque et de ces dégradations étaient les mêmes, c’est-à-dire un mouvement de contestation initié par le candidat lui-même, dans ce cas Donald Trump. Or on sait que pour la démocratie, la paix et pour que le processus d’investiture d’un nouveau président se déroule correctement, la reconnaissance claire et formelle de la défaite par le perdant est nécessaire, ce que Trump et Bolsonaro n’ont pas fait, créant ainsi une révolte de leurs fidèles ainsi que d’énormes tensions au sein de la société. Pour poursuivre, il y a le discours d’un des casseurs à analyser. Le militant affirme que si Bolsonaro avait été élu, une telle situation de désordre ne se serait jamais produite. A travers cette phrase centrale, Hermann dénonce la mauvaise foi, la malhonnêteté et le manque de réalisme des soutiens de Jair Bolsonaro. Les manifestants engendrent une situation de crise politique, de vandalisme, de vol et de haine et ils rejettent, malgré tout, la faute sur Lula qui n’a pourtant intégré sa fonction de président que le 1er janvier 2023. De plus, il est évident que si leur candidat avait été élu, ils n’auraient pas agi d’une telle manière. Néanmoins, c’est peut-être le camp adverse qui aurait commis de tels actes, la situation aurait donc été la même.
Pour conclure, on peut dire que le Cartooniste Hermann a voulu critiquer et mettre en avant un des jours noirs de la démocratie au Brésil, à travers son dessin de presse. Cet évènement aura révélé certaines limites et lacunes de la démocratie.
Hugo Koczy